En immersion – Au siège de Fox
Nous voici devant l’étonnante entrée du siège de l’équipementier mythique, à Irvine (USA), dans la banlieue sud de Los Angeles. Si vous êtes vététiste ou motard, vous avez sans doute porté du Fox à un moment ou l’autre de votre passion. Poussons la porte et allons voir ce qu’il y a derrière la fameuse tête de renard.
Fox : Dans la gueule du renard …
David Ahumada, l’une des têtes pensantes de Fox, nous attend. La visite commence. Il a aussi un nouveau casque d’enduro à nous présenter … Le soleil tape déjà fort ce matin-là et nous sommes bien contents d’aller nous réfugier dans l’intrigant bâtiment, peu habitués que nous sommes à encaisser les UV californiens. L’entrée si particulière est censée rappeler les entrées d’air des mentonnières des casques de la marque. Peu importe, on trouve ça plutôt sympathique comme effet visuel. Bienvenue dans le terrier du renard, la marque créée par Geoff Fox dans les années 70. Son frère, Bob, s’occupera de son côté de l’autre Fox, la marque de suspensions. Prolifique, la fratrie !
La marque née à Morgan Hill, bien plus au nord de la Californie, est venue il y a déjà de longues années s’agrandir dans la chaleur de LA. Près de 200 personnes s’activent dans l’entreprise. Fox dispose d’une succursale au Canada et d’un siège européen basé à Barcelone. L’entreprise possède aussi un grand centre logistique aux USA. Mais c’est bien là, à Irvine (comptez plus d’une heure, plein sud, depuis le centre de LA) que des têtes pensantes imaginent les produits et que d’autres décident des stratégies. C’est David Ahumada, le Global Product Manager, qui va sacrifier quelques minutes de son précieux temps pour nous faire la petite visite. Le bâtiment dispose d’abord d’un grand showroom, ouvert au public. Il est certes possible d’y acheter des fringues ou autres protec’, mais Fox ne communique pas spécialement dessus, pour ne pas fâcher les dealers environnants.
Au sein de l’univers Fox
Mais il est temps de rentrer dans le vif du sujet en poussant une grande porte sécurisée. On arrive alors dans ‘‘main street’’, sorte de rue intérieure qui partage le bâtiment en deux. Pour l’occasion, beaucoup de monde gravite là, la grande présentation du nouveau casque Proframe (ndlr : lire notre test) ayant lieu ici dans quelques instants. D’un côté, on trouve tous les bureaux : activité commerciale, direction, design, postes marketing, etc. De l’autre, la R&D se dissimule derrière des cloisons impénétrables. Nous n’irons pas, à notre grand regret. Trop sensible, nous dit-on. David nous explique que c’est là que sont étudiées les matières, conçus les prototypes. C’est aussi là que se trouvent des machines et autres trouvailles en matière de tests en tous genres. Au fil de notre promenade, on découvre sans arrêt des reliques de moto. Années 70, 80, 90. Un vrai musée. On reste par contre un peu sur notre faim, sans voir particulièrement de VTT, hormis les visuels de circonstance du nouveau Proframe, un peu partout. Pas même un vieux ‘‘Spé’’ de Shaun Palmer, légende vivante liée à Fox pendant de longues années !
Mais on comprend très vite que ce qui a toujours principalement fait battre le cœur de Fox, c’est bien le MX. On est en Californie, tout de même ! Cela dit, il doit faire bon bosser ici. Table de ping-pong, coin détente, piste extérieure constamment entretenue pour faire tourner les mini-motos, tables de pique-nique un peu partout dehors pour manger au calme… L’ambiance semble studieuse et détendue à la fois. Y a pas à dire, ils savent faire. Et c’est en achevant le tour du propriétaire qu’on l’on mesure l’importance de cette marque. Ce logo mythique qui traverse les générations de motards et de vététistes. Fox, c’est finalement l’une des rares marques présentes dans notre sport, que nous ayons tous portée à un moment ou à un autre. Preuve parfaite du succès incontestable de l’entreprise. Et, un peu comme Oakley, Fox est définitivement et depuis longtemps ancrée dans les esprits, naturellement. Et nous voilà pile poil en plein cœur de tout ça. On apprécie. Mais il est temps d’aller bosser. On n’est pas là que pour faire du tourisme. La présentation du casque commence d’un moment à l’autre…
Un accent français chez Fox
Interview de Matthieu Bazil : le vice-président exécutif de Fox Head
Ce petit passage en Californie était finalement tout sauf un séjour linguistique. Rendez-vous compte, dans cette grande boîte américaine, nos interlocuteurs étaient presque tous francophones. On exagère certes un peu, mais chez Fox, il plane tout de même un fort accent frenchy. Présent pour l’occasion et basé le reste du temps au siège européen de Barcelone, Vincent Saccomani se charge, entre autres, des pilotes de la marque, avec sa fonction de MTB Sport Marketing Manager. Autre frenchy rencontré durant cette visite : Johann Bondu, ni plus ni moins que le Directeur Marketing Europe, lui aussi en poste à Barcelone. Comment voulez-vous affiner votre anglais dans ces conditions… On cherchait donc désespérément un Américain à qui parler quand Johann nous présente Matthieu Bazil, ancien vice-président à l’international et récemment nommé «Executive Vice President» sur tous les marchés, y compris nord-américain et européen. En clair, le numéro 2 de l’exécutif. Une promotion récente puisqu’il venait de s’installer dans son nouveau fauteuil, ici à Irvine, une semaine avant cette rencontre. L’entretien se passe donc en français…
Vélo Vert (V.V.) : On avait un peu l’impression que Fox n’était plus très active en matière de VTT il y a quelques années. Surtout, beaucoup de nouvelles petites marques semblaient faire davantage parler. Ce nouveau casque est-il le résultat d’une nouvelle impulsion majeure ?
Mathieu Bazin (M.B.) : Le VTT a toujours été l’une de nos spécialités, il fait partie de notre histoire et de notre ADN. Fox a été le premier grand équipementier, avec Shaun Palmer comme porte-drapeau à l’époque*. Fox est le leader historique. Et cela a pu causer quelques difficultés par le passé. Il faut être honnête, en jouissant de ce statut, peut-être qu’à un moment donné, on a ‘‘cruisé’’ un peu. On a été moins actifs. On avait peut-être un peu oublié cet ADN VTT. Je pense qu’on a vu le VTT un peu comme le BMX. On s’est dit peut-être un peu tard qu’il fallait s’y remettre à fond et le considérer comme une priorité. Donc oui, on a marqué le pas à une époque, mais depuis quelques temps, on a fait des gros efforts, nous nous sommes recentrés sur les priorités, et ça paye.
V. V. : C’est-à-dire, qu’est-ce qui a changé ?
M. B. : Ce sont des gros investissements spécifiquement sur le VTT, comme pour ce casque par exemple. De gros investissements aussi sur les pilotes pros qui travaillent avec nous. On s’est recentré également sur l’image de Fox, avec un ADN très orienté descente, gravity que l’on exploite au mieux. C’est plus que jamais une priorité pour nous de conserver et soigner cette image. Ce qui ne nous empêche pas du tout de nous adresser à tout le monde, peu importe le niveau, la pratique. Fox n’est pas et ne doit pas être une marque exclusive ou élitiste. C’est simplement une marque avec une très forte image. Nous avons des produits pour toutes les pratiques et pour tous les niveaux, en cross-country, en all-mountain, etc. Mais tous ces produits doivent coller à l’image.
V. V. : Et les résultats sont donc là ?
M. B. : Sur le marché européen, côté VTT, on a effectivement commencé à se remettre très sérieusement en marche ! Ça fonctionne très bien et la marque enregistre de belles progressions.
V. V. : Comment se fait la répartition entre les activités moto et VTT ?
M. B. : Pour nous, l’activité liée à la moto s’est toujours très bien portée. Nous sommes les leaders partout en ‘‘race wear’’. Nous avons aussi énormément de pilotes pros avec nous. Au global, c’est la moto qui est majoritaire, sur tous les marchés, US comme Europe. Pour l’Europe précisément, nous sommes en ce moment à 45 % pour la moto et 35 % pour le VTT. Mais le VTT progresse plus fort. En 2012, il représentait 20 %. Aux USA, la proportion est différente. La moto est encore plus importante pour nous. Mais c’est aussi logique. C’est culturel. Tout le monde fait de la moto ici…
V. V. : On imagine que les marchés sont très différents, en effet. Qu’en est-il de la France ?
M. B. : Même en Europe, les différents marchés ont leurs spécificités en matière d’équipements techniques. Les trois pays les plus importants sont la France, l’Allemagne et l’Angleterre. Ils sont à peu de choses près équivalents en terme de taille pour Fox. En Angleterre, c’est particulier car c’est très gravity, presque exclusivement d’ailleurs ! Le marché français est très important car il est très représentatif de tout. C’est un marché qui fonctionne pour tous les types de produits, toutes les pratiques VTT. On le considère vraiment comme un marché laboratoire.
V. V. : Est-ce parce que le marché français est si important que vous avez recruté Loïc Bruni et Loris Vergier cette année ?
M. B. : Non, pas du tout. On s’est dit que l’on voulait investir sur le long terme en matière de pilotes. Nous recherchions des jeunes gars prometteurs, parmi les meilleurs. Il se trouve que Loïc et Loris en font partie. Il se trouve aussi qu’ils étaient disponibles. On s’est très vite rendu compte qu’ils étaient très motivés à l’idée de nous rejoindre, qu’ils aimaient vraiment la marque. Voilà comment ça s’est fait, ça n’a strictement rien à voir avec leur nationalité.
* La phrase légendaire lâchée par Shaun Palmer à l’époque, pour justifier son rapprochement avec Fox : «je ne voulais pas ressembler à un patineur de vitesse. Je voulais ressembler à un pilote de motocross».