Test du VTT BMC Fourstroke
> Test initialement publié dans Vélovert – Texte > Julien Nayener & Photos > Thibaut Simon
Il était attendu. Le nouveau Fourstroke de BMC a été présenté en marge des Championnats du Monde de Lenzerheide. On y était et on a pu découvrir un vélo totalement en phase avec les nouvelles exigences du Cross-Country moderne. Une machine qui se démarque également de la concurrence par certains choix techniques comme sa tige de selle télescopique intégrée. Non, ce nouveau BMC ne peut clairement pas laisser indifférent…
BMC Fourstroke : ça valait le coup d’attendre
BMC a pris son temps. Alors que de nombreux constructeurs ont sorti, ces dernières saisons, leur nouveau tout-suspendu de XC, la marque suisse est restée muette sur le sujet. Le Fourstroke ancienne version commençait pourtant à laisser apparaître quelques rides. En 2014, il roulait déjà et avait alors été sacré champion du monde entre les mains de Julien Absalon, en Norvège.
Quatre ans, ça peut paraître peu, vous allez dire, mais c’est beaucoup à l’échelle temporelle du Cross Country de compétition. Les circuits de Coupe du monde – ou de France d’ailleurs – sont sans cesse plus techniques voire engagés. Elle est loin l’époque où les courses ne se jouaient qu’à la pédale ou presque. Le matériel s’est adapté à cette nouvelle donne et BMC commençait donc à accumuler du retard avec son ancien Fourstroke, devenu au fil du temps plus «marathonien» dans l’âme que «puncheur» de XC.
Oui, la marque suisse s’est fait attendre, mais elle n’a pas fait les choses à moitié : son nouveau tout-suspendu de Cross-Country est une machine résolument moderne, avec certains choix techniques osés et un vrai parti pris. Elle cible un public de compétiteurs ou à tout le moins de sportifs assidus, qui en «pincent» pour le matériel exclusif. Le fait que ce nouveau VTT BMC, toujours en 100 mm de débattement, n’existe qu’en carbone est une première indication sur l’orientation du vélo.
La présence d’une tige de selle télescopique intégrée – inédite sur un XC – en dit également beaucoup sur la volonté et la capacité d’innovation chez BMC, en même temps qu’elle colle parfaitement à l’évolution du Cross-Country dont on parlait il y a quelques lignes. Curiosité technique, cette «RAD» («Race Application Dropper»), qui présente la particularité d’être de forme ovale n’a pas été conçue pour le seul plaisir de se démarquer de la concurrence ou pour un unique argument esthétique. Pour quoi, alors ? Parce qu’elle serait à la fois «plus légère, plus résistante et plus fonctionnelle», d’après BMC. Son design intégré permettrait ainsi selon la marque suisse d’économiser plus de 100 grammes par rapport à des tiges de selle télescopiques «traditionnelles». Au jeu des comparaisons, la RAD afficherait donc 345 grammes sur la balance, contre 425 pour la KS Lev Ci et 517 pour la Fox Transfer Factory. Fabriquée avec un nombre réduit de pièces par rapport à des modèles «classiques», elle serait également a priori plus facile à entretenir et plus fiable dans le temps. Sa forme ovale et ses parois d’épaisseurs variables (plus de matière sur le devant pour plus de rigidité frontale et moins sur les côtés pour économiser du poids) permettraient également d’accroître sa résistance en torsion.
Bref, vu comme ça, on gagnerait presque sur tous les tableaux si la RAD n’avait le défaut de son avantage : le fait qu’elle ne soit pas ronde interdit d’en changer pour un autre modèle et, au passage pour ceux qui le souhaiteraient, de monter une tige de selle non télescopique. C’est le choix de BMC, il ne fera sans doute pas l’unanimité, mais il est sans concession.
La marque suisse n’a pas tergiversé non plus quand elle a validé la géométrie du nouveau Fourstroke. Si certains «full» de XC restent relativement sages en la matière, le nouveau BMC épouse une logique diamétralement opposée. Avec 67,5 degrés, son angle de direction est parmi les plus couchés dans le paysage des vélos de Cross-Country. Il roule sur les plate-bandes de l’Intense Sniper ou encore du Santa Cruz Blur.
Autre chiffre saillant et révélateur, celui de la longueur des bases : le nouveau Fourstroke affiche 429 mm, c’est 16 mm de moins que l’ancien. A l’inverse, le top tube s’allonge (607 mm en taille M) et le reach aussi (445, toujours en Medium). Si l’on ajoute au tableau un angle de tube de selle volontiers redressé (75,5°) et des potences plutôt courtes (de 50 à 70 mm selon les tailles de cadres), on obtient une position sur le BMC résolument agressive et tournée vers l’attaque.
À la chasse au gramme
BMC a également beaucoup travaillé sur le poids. Si celui-ci n’est plus aujourd’hui le seul critère de performance sur un vélo de XC, il reste néanmoins un paramètre important. BMC a donc traqué les grammes un peu partout : au niveau du jeu de direction, de la biellette supérieure qui passe de l’alu au carbone, de l’axe arrière mais aussi de toute la visserie de suspension. La cinématique, on y vient, c’est quasiment la seule chose qui ne change pas entre l’ancien et le nouveau Fourstroke.
La marque suisse aurait pu prendre la roue de nombreux constructeurs qui préfèrent un triangle arrière sans point de pivot, misant sur la flexion des bases et des haubans, mais elle est restée fidèle à son système APS. C’est peut être un peu plus lourd, mais BMC estime que le rendu sur le terrain est meilleur comme ça et que l’on peut mieux contrôler la suspension sur l’ensemble du débattement. Alors en effet, pourquoi changer dans ces conditions…
Prix exclusifs
Outre un kit cadre, la gamme Fourstroke sera articulée autour de trois modèles : le One, le Two et le Three, ça ne s’invente pas. Les prix s’échelonneront entre 5999 euros et 9999 euros. Evidemment, BMC n’est pas la marque la mieux placée du marché en terme de rapport prix / équipement. Concrètement, on peut par exemple regretter que la version intermédiaire, le «Two» (qui coûte 7999 euros) et que nous avons testée, ne soit montée qu’avec des roues alu et pas des carbone. Mais ce nouveau Fourstroke peut compter sur d’autres atouts pour séduire son public…
Biellette carbone et suspensions FOX
Si l’ancien Fourstroke était équipé d’une biellette supérieure en alu, le nouveau en reçoit désormais une en carbone. Pour BMC, l’enjeu était de fiabiliser la production en série de cette pièce en composite qui permet à la fois un gain en rigidité et une économie de 40 grammes sur la balance. La marque suisse a par ailleurs choisi de faire confiance à Fox pour tout le volet «suspensions».
Les trois modèles de la gamme Fourstroke seront donc dotés d’amortisseurs et de fourches Fox, ces dernières affichant un offset identique de 44 mm, un atout dans les virages serrés. Il faut croire en revanche que BMC n’était pas totalement satisfait des manettes de blocage du fabricant américain, puisqu’elle a préféré s’adresser à DT Swiss pour ce type d’équipement. La commande au cintre pour la tige de selle télescopique intégrée a elle été développée par BMC elle-même.
Intégration maximale
Le Fourstroke reçoit une douille au standard 1,5” / 1,5” avec jeu de direction intégré. En bas de celui-ci figure une butée qui évite à la partie supérieure de la fourche de venir frapper le tube diagonal. Pour plus de précautions encore, BMC a choisi d’installer un cache en plastique qui protège le cadre et qui sert aussi de guide-gaine. La marque suisse a par ailleurs
développé sa propre potence (en aluminium), élargie dans sa partie supérieure au contact avec le cintre, pour une rigidité et une précision de pilotage accrues. Sa longueur variera selon les tailles de cadres : 50 mm pour les vélos en S, 60 pour les M et 70 pour les vélos en XL. A noter que des entretoises profilées peuvent être placées dessous pour remonter si nécessaire le poste de pilotage. La marque suisse a également équipé son Fourstroke d’un guide-chaîne d’allure minimaliste.
Le test terrain : appétissante mise en bouche
C’est un comité d’accueil royal qui nous attendait pour cette prise en mains du Fourstroke, le lundi, au lendemain des championnats du monde de Lenzerheide. Outre le staff BMC, le team au grand complet était présent pour accompagner la dizaine de journalistes conviés à ce test inaugural : Titouan Carod, le champion de France et premier Français de ces Mondiaux (7e), Lars Forster, Filippo Colombo et Reto Indergand nous ont donc servi de guides sur le très exigeant circuit suisse, écrin idéal pour jauger une première fois des capacités du nouveau tout-suspendu de la marque helvète. Arrivé au chalet à quelques encablures de l’aire de départ / arrivée, antre de BMC pendant ces championnats du monde, on commence donc par prendre quelques repères en statique avec le Fourstroke.
Notre vélo de test est le modèle intermédiaire de la gamme (le «O1 Two») équipé du nouveau groupe XTR. On règle le SAG à 25 % (la valeur haute), on se dit que ce ne sera pas superflu pour aller se mesurer aux racines saillantes du tracé de Lenzerheide, même si on note au passage qu’on peut descendre jusqu’à 20 % pour obtenir une suspension plus ferme sur des parcours plus roulants. Quelques clics au niveau de la fourche et de l’amortisseur pour parachever le tout et il est temps d’ajuster la pression des pneus : ce sera 1.3 devant, 1.4 derrière dans les polyvalents Vittoria Barzo, qui équipent du reste tous les Fourstroke de la gamme. Une fois prêt, c’est parti pour un premier tour de circuit.
La montée roulante du départ met d’emblée dans le rythme et fait grimper le palpitant en même temps qu’elle permet de se rendre compte du répondant et de la rigidité du nouveau BMC. Mais c’est une fois qu’on bascule dans la première descente qu’on entre vraiment dans l’univers de Lenzerheide. Impitoyable avec ses racines et ses incessants changements de rythme… Non seulement on n’a jamais vraiment de répit physiquement, mais il faut être propre techniquement.
Dans ce contexte, le Fourstroke nous facilite la vie. Dans les parties descendantes, on perçoit les bénéfices de l’évolution de la géométrie. Avec son angle ouvert et ses bases courtes, le BMC offre une bonne alchimie, se montrant stable tout en restant maniable et agile dans les petits enchaînements. Clairement, le vélo appartient à cette nouvelle génération de XC pointus en terme de pilotage et qui réclament peut-être un peu de temps avant d’être totalement domptés, mais qui épatent par leurs aptitudes dans le dénivelé négatif et/ou le technique. Le travail des suspensions est excellent, tant sur les gros chocs que sur les impacts moins importants.
Certains passages nous ont ainsi semblé très révélateurs. On veut parler de ces champs de racines où on peut continuer à pédaler en restant bien calé sur la selle. Là, le Fourstroke donne la sensation de lisser le terrain et on gagne sur deux tableaux. Non seulement on ne bute pas partout et on avance efficacement, mais on s’économise aussi physiquement. Titouan Carod nous a d’ailleurs glissé un précieux conseil durant cette matinée : nous qui roulions souvent avec l’amortisseur en position intermédiaire sur les sections cassantes planes ou montantes, il nous a recommandé d’utiliser plus souvent le mode totalement ouvert. Et effectivement, on a pu voir la différence avec un gain sensible en motricité !
Pour ne rien gâcher, l’ergonomie et la précision de la commande au cintre DT Swiss invitent à jouer avec les trois réglages de suspensions (ferme, intermédiaire et ouvert). Vraiment un très bon choix de la part de BMC. Dommage que la manette de la tige de selle télescopique, dont le fonctionnement mécanique est par ailleurs d’une fluidité exemplaire, ne soit pas tout à fait au diapason avec un maniement plus flou et moins franc. Cela nous a surtout paru gênant dans les phases de remontée durant lesquelles on n’a pas vraiment de repère sensitif qui permet de savoir si l’opération a bien été effectuée.
Conclu par un tour de circuit en mode course (on a fini en apnée derrière Titouan et Filippo qui eux étaient en balade), ce premier contact avec le Fourstroke nous a en tout cas séduits et mis l’eau à la bouche. On a désormais hâte de tester le nouveau BMC sur une plus longue durée, sur des sentiers connus, mais aussi plus frais et moins fatigués qu’un lendemain de championnat du monde. Alors, rendez-vous bientôt pour le prochain épisode.