En immersion – Dans les coulisses d’Urge
Article initialement paru dans Vélo Vert n°259 en septembre 2013, par Sébastien Corradini (photos et texte)
Urge est une marque à part dans le monde du casque vélo. Elle porte en elle les gènes de ses créateurs, une identité forte avec un esprit qui fait toute la différence. Peu prolixe, la petite firme qui se consacrait jusqu’alors à des pratiques «gravity» s’intéresse désormais au cross-country en lançant le SupAcross, un tout nouveau casque que nous sommes allés découvrir en exclusivité chez Urge, à Cogolin, dans le Var.
« Des casques et des hommes »
Urge, c’est cinq associés dont le plus connu est Fabien Barel, l’ex-champion du monde de descente aujourd’hui reconverti avec succès à l’enduro. Pilote testeur, ambassadeur, développeur, Fabien est particulièrement investi dans Urge. Mais Urge, c’est aussi la rencontre de deux hommes, Zoobab et Fred Glo. Le premier, de son vrai nom Jean-Pierre Garnier est un autodidacte, designer de son état, une personnalité atypique, un personnage comme on dit. Un sourire généreux, l’œil pétillant, Zoobab, c’est le créatif des belles années de Sunn, puis de Commençal. Dilettante, il se dit éternellement en vacances, partageant son temps entre VTT, surf et ski, mélangeant avec enthousiasme boulot et vie. Il est à l’origine du nom et de la marque Urge. Au début des années 2000, il s’agissait de concevoir des casques de ski, comme ça, un peu à l’arrache comme on dit, comme un artisan…
Au milieu de cette décennie, Zoobab rencontre Fred Glo, le boss de Tribe Sport Group, distributeur des marques prestigieuses Yeti, Rocky Mountain et Fox notamment. Fred est un chef d’entreprise autodidacte lui aussi. Attaché à des valeurs humaines fortes et soucieux de la préservation de l’environnement, il admire Yvon Chouinard, le créateur de la marque Patagonia. L’un a fait de sa vie un art, l’autre veut que la sienne soit fidèle à ses valeurs, ils décident de donner naissance à Urge Products en 2008 dans le giron de South Shore Bicycles qui développe déjà la gamme Brake Autority. Ils sont catégoriques, la marque restera une marque exclusive de casques, elle ne lorgnera probablement jamais vers la moto ou même le vélo de route, ce n’est pas l’esprit. Bien entendu, Urge devra grandir, mais ça ne sera jamais au détriment des idées qui ont prévalu à sa création. Urge, c’est leur bébé, celui qui porte tous leurs espoirs et toutes leurs ambitions. Le fils prodige ne doit pas décevoir et pour cela ses géniteurs ne lésineront pas sur les moyens et le temps pour cultiver amoureusement son identité.
Immuablement zen et décontracté dans la vie, Zoobab devient sérieux dès qu’il se penche sur son SupAcross. Certes, le casque ne présente pas de technologie révolutionnaire, mais il a été pensé pour être différent de ce qui existe sur le marché sans négliger pour autant le confort, la sécurité et le respect de l’environnement…
Urge : des idées derrière le casque
On ne saura pas dire si ça le rend meilleur, plus intéressant ou plus beau, chacun jugera selon ses goûts, ses envies, ses attentes. En tout cas, ce que l’on peut assurer c’est qu’il est différent. Différent du point de vue du design puisque son look atypique s’adresse exclusivement aux crosseurs. La discrète petite visière est immuablement intégrée à la coque in-mold (la coque en polystyrène est moulée dans le revêtement rigide en polycarbonate). Sa coque très enveloppante se veut très protectrice tout en restant relativement compacte. Même s’il suit la plupart des codes des casques cross-country (légèreté – 260 grammes -, maintien occipital, coque aérée, ligne projetée vers l’arrière), il affiche une identité forte reprenant les signes visuels caractéristiques de la marque : points rouges et ouvertures rondes «grillagées».
Différent également du point de vue de la conception qui donne une place privilégiée au respect de l’environnement. Chaque fois que c’est possible, ce sont des matériaux recyclés qui sont utilisés même si ça doit impliquer des développements techniques spécifiques et un coût de revient un peu supérieur aux technologies usuelles. Résultat, le SupAcross sera composé d’une coque, de sangles et de boucles respectivement en polystyrène, polyéthylène téréphtalate (PTE) et polyéthylène haute densité (PEhd) recyclés. Seules les mousses internes et la coque extérieure échappent à ce principe éco-responsable, du moins jusqu’à ce que les technologies de production le permettent.
Alors bien entendu, on pourra s’étonner que le SupAcross soit, comme tant d’autres, sous-traité en Asie. Comme le souligne Zoobab en défendant ses choix, l’outil et le savoir-faire a quasiment disparu en Europe, et ceux qui auraient pu travailler avec Urge n’en n’ont ni la capacité, ni la volonté. Il précise également : «Nous connaissons notre partenaire depuis longtemps, nous avons une relation amicale qui dépasse le cadre purement professionnel et si nous nous montrons exigeants, c’est uniquement sur la qualité et le respect de nos choix techniques, ou sur la volonté de faire évoluer les process de production sur le plan environnemental, pas sur la négociation des tarifs. Nous sommes soucieux de la qualité de nos casques, mais aussi du bien-être de ceux qui les produisent». Puisqu’on vous dit qu’il y une âme chez Urge …